Louis et moi, ayant un intérêt grandissant pour les anciens pays du bloc soviétique, et plus généralement d'Europe de l'Est au sens large, nous avions cette fois opté pour un des pays les plus lointains, à la limite de l'Asie: La Géorgie, pays montagneux du Caucase et pays natal de Staline avec une histoire riche et des paysages apparemment à couper le souffle. 
C'était aussi l'occasion de faire découvrir cet univers à Pierrick, qui pouvait enfin nous accompagner sur une de ces destinations.
Pays assez méconnu, je m'étais petit à petit renseigné à son sujet au fil de mes recherches sur les pays de l'ex-bloc soviétique et il a tout de suite retenu mon attention, notamment par la diversité des paysages qu'il semblait contenir (du désert aux montagnes glacées). Mais aussi car il y perdurait de nombreux vestiges de l'URSS, les habitants étant plus attachés qu'ailleurs à leur histoire soviétique (sans doute en partie car Staline était originaire du pays). 
Ayant eu une bonne opportunité au niveau des billets d'avion, je me suis envolé de l'autre coté de la mer Noire avec Pierrick et Louis, à la veille de la crise du Covid-19 dont nous ignorions tout de l'ampleur qu'elle prendrait peu de temps après.
A force de parcourir les pays de l'Est, rudes et même parfois assez hostiles, nous avions anticipé et prévu de quoi rester les plus autonomes possible afin d'éviter les déconvenues et les pertes de temps inutiles.

1er JOUR : Aéroport & route vers l'intérieur du pays
Après une étape chez Pierrick à Orléans, où nous nous sommes retrouvés tous les trois, nous avons fait route jusqu'à Beauvais en pleine nuit, pour y arriver au petit matin.
A l'aéroport, nous avions été très étonnés de nous retrouver parmi des flots de gens, la plupart étrangers, tous masqués (à ce moment là, on ne parlait même pas du port du masque en France).  Les gens remplissaient les files d'attentes, massés et plus fébriles que d'habitude, comme pressés de quitter le pays, inquiets de la pandémie qui se dessinait à l'horizon.
A ce moment là, toute cette agitation et ces masques nous avaient plus fait sourire qu'autre chose, jugeant les gens qui nous entouraient de paranoïaques.
L'avion finit par décoller, après quelques galères avec la sécurité à cause des batteries de mon drone qu'ils auraient pris pour des explosifs. Durant le vol nous avons discuté avec deux géorgiens vivant en France, et donc parlaient français. Ils nous donnèrent quelques conseils sur des endroits à aller voir ainsi que des détails pratiques pour notre itinéraire.
En arrivant, nous avons pu observer par les hublots la côte géorgienne sur la mer Noire ainsi que les montagnes du Caucase au loin derrière, immense chaine montagneuse qui s'étend tout le long de la frontière avec la Russie.
Au bout de 4H30 de vol, l'avion s'est posé sur le tarmac de l'aéroport de Koutaïssi, 2eme ville la plus importante du pays ( de toute façon il n'y a que 2 "grandes" villes dans le pays, Koutaïssi et Tbilissi, la Capitale ).
Un fois débarqués, tous les passagers ont eu droit à un test de température, toujours dans le cadre du COVID qu'ils semblaient prendre beaucoup plus au sérieux que chez nous.
Puis, sur les conseils de nos amis de l'avion, nous nous sommes dirigés vers un kiosque dans le hall pour acheter des cartes SIM prépayées, car nos cartes françaises ne fonctionnaient pas ici.
Enfin, dernière étape avant de pouvoir "commencer" le voyage, nous avons rejoint le type à qui j'avais loué un 4x4 sur le parking, un Duster, nécessaire vu l'état du réseau routier, notamment dans les zones où nous voulions nous rendre.
Avec le décalage horaire, il était déjà 16H30 lorsque l'avion s'était posé. La journée commençait doucement à tirer sur sa fin, donc nous avons filé sans attendre, chargeant les sacs dans le coffre du 4x4 pour prendre la direction de Gori en plein centre du pays.
La route était longue et encombrée de camions de fret, c'est l'axe principale qui traverse le pays d'Est en Ouest ralliant les quelques villes d'importance, dont Gori. Elle serpentait entre des montagnes arides et hautes où des travaux titanesques étaient entrepris pour améliorer son parcours. Nous avons vu beaucoup de chantiers de ponts, de tunnels perçant les montagnes afin de tirer au droit plutôt que de zigzaguer autour des montagnes dans le fond des vallées. 
La nuit est vite tombée, surtout à l'ombre des montagnes, et lorsque nous avons retrouvé la plaine, il faisait déjà nuit noire. Un rapide arrêt dans une épicerie au bord de la route pour prendre de quoi déjeuner le lendemain matin puis nous avons rallié notre logement chez l'habitant dans la banlieue de Gori. En nous voyant débarquer, notre logeur a réalisé qu'il nous avait totalement oublié et avait déjà loué sa chambre. Bon prince, il nous a mené chez sa mère à quelques rues de là qui louait aussi parfois une partie de sa maison, et nous avons pu disposer de tout l'étage.
Une fois le logement investi, nous sommes allés à la recherche d'un restaurant dans les environs pour le repas du soir. Nous avons atterri dans un petit restau de quartier tout en bois, où se tenait déjà un gros banquet de famille. Dans notre coin, nous avons commandé plus ou moins au hasard car la carte n'était pas traduite. On s'est retrouvé avec des plats copieux de viandes en sauce, très épicés mais tout de même délicieux. 
Nous nous en sommes tirés pour 7€ par personne, incluant 2 bières chacun, une soupe et le plat principal. C'est une habitude que nous avons pris dans ce type pays: diner tous les soirs dans des restaurants ou des boui-bouis. Cela évite de trimballer la nourriture dans la voiture tous les jours, comme nous changeons de logement à peu près chaque soir et cela nous permet aussi de découvrir la cuisine locale. D'autant plus qu'un repas nous coûte rarement plus de 8€ et que le midi nous mangeons à la va-vite pour gagner du temps, un bon plat copieux le soir est donc toujours le bienvenu.
2ème JOUR : Gori, monastères & Tbilissi
Au lever du jour, la vieille dame chez qui nous logions a toqué à la porte pour nous apporter un plateau de nourriture pour le petit déjeuner: 3 cafés, du pain tranché, du fromage et des saucisses industrielles russes roses fluo. Habitués à avaler ce genre de repas suspects, nous avons rapidement déjeuné sur la table basse avant de refaire nos sacs, saluer la patronne, puis grimper dans la voiture pour se rapprocher du centre ville de Gori.
Gori est une petite ville, avec un centre assez restreint et des banlieues résidentielles très étalées tout autour dans la plaine. Notre première étape, au petit matin, fut la vieille forteresse de la ville perchée sur sa colline en plein centre.
Ruine plutôt bien préservée, elle n'était pas accessible lorsque nous nous y sommes rendus au lever du jour, de toute façon nous ne comptions pas la visiter, mais juste l'observer d'en bas et faire voler le drone au dessus pour capturer quelques belles images.
En face de là où nous nous étions arrêtés, il y avait une jolie église où l'écriteau à l'entrée était étonnamment écrit en français. Il s'agissait de " l'Eglise Française de Gori ". Je ne sais pas bien pourquoi ni comment ce site existait, toujours est-il que nous y sommes entrés pour y admirer les peintures murales et la décoration bien plus riche et chargée que dans nos austères églises de l'hexagone.  Près de l'autel, des peintres s'activaient, rénovant les fresques ancestrales avec minutie. Je suis resté les observer un certain temps tandis que Louis et Pierrick faisaient le tour des reliques sous verre disposées ici et là.
En sortant de cette église, nous avons pu assister à une procession qui démarrait dans la cour et partait je ne sais où dans la ville à grands renforts de chants et de cloches sonnées à bras le corps.
Nous sommes ensuite revenus dans le centre-ville, sur la place principale, un immense rectangle bétonné, parsemé d'arbres et de bassins ornementaux à sec depuis longtemps. Gori est la ville natale de Staline et de ce fait, les habitants de la ville lui vouent un culte fort, cette place s'appelle d'ailleurs le "Stalin Park" on y trouve tout au bout un musée entièrement consacré au dictateur.
Le plus intéressant de ce musée est l'espèce de temple qui a été bâti autour d'une très vieille maison de bois, celle-là même où Staline est né. Le reste du quartier a été rasé pour laisser place au musée, de son vivant, et seule sa maison subsiste logée sous ce temple. Juste à coté trône aussi une statue du dictateur d'un blanc immaculé. C'est un véritable lieu de pèlerinage pour les nostalgiques de l'URSS et sans aucun doute le lieu touristique majeur de la ville.
Nous n'avons pas pu visiter le musée car fermé à cause de l'épidémie de Covid, nous avons donc simplement fait le tour du bâtiment en observant quelques reliques, tel le wagon de train personnel de Staline, déplacé jusqu'ici depuis Moscou.
Au delà du musée nous avons fait un petit tour à pieds autour de la place et les rues alentours, qui étaient particulièrement calmes, pour ne pas dire désertes. Une ambiance étonnante qu'on retrouve assez souvent dans les villes des pays de l'Est et qui contraste avec nos centres-villes hyperactifs.
Après cette balade dans Gori, nous sommes remontés dans le 4x4 pour prendre la route direction le Sud, vers les montagnes. A 1h30 de route de Gori, au fin fond d'une vallée aride, se trouve un petit monastère très ancien et son Eglise "Atenis Sioni" bordée des jardins et vergers que les moines entretiennent avec soin. 
Les distances ne sont pas forcément immenses, mais les routes, faites de terre battue, avec souvent des éboulements ou des passages étroits à dépasser prudemment allongent vite les temps de route. 
Nous avons dépassé quelques villages "reculés", de simples maisonnettes faites de bois bordant la route qui le traverse dans sa longueur, quelques paysans dans le bas de la vallée brûlaient des herbes sèches, enfumant toute la montagne et le village au passage. Juste à la sortie du village, sur un piton rocheux se dresse l'église flanquée du minuscule monastère. Nous avons été accueillis par un moine qui nous a ouvert le portail et nous a ensuite laissé déambuler librement dans les jardins et dans l'église. Le promontoire derrière l'église offrait une belle vue sur la vallée en contre bas et sur les montagnes tout autour.
Louis retourna discuter avec le moine qui nous avait accueilli, qui lui montra les quelques ruches du monastère, ainsi que les produits de leur jardin qu'ils vendaient. Il en profita d'ailleurs pour acheter un sachet de grains de poivre et d'autres épices ainsi que des bougies de prière fabriquées avec la cire des ruches.
J'ai apprécié ce moment un peu loin de tout dans un monastère désert au fond d'une vallée perdue, un sentiment de calme et de sérénité se dégageait de l'endroit. En me baladant dans les jardins ou sur les terrasses je m'imaginais la vie de ces moines, fonctionnant en communauté quasi autarcique, une vie frugale et simple qui je pense peut avoir certains attraits.
En quittant le monastère, nous avons dû rebrousser chemin car la route menant au fond de la vallée finissait en cul-de-sac, nous sommes alors repassés au travers de ces villages isolés où nous avons fait quelques arrêts afin que je prenne des photos depuis la route qui les traverse. Il n'y a pas ou quasiment pas de rues transversales, la plupart des habitations sont simplement bâties le long de la voie. Cette configuration me rappelait un peu les villes du Far-West telles qu'on les voit souvent au cinéma. 
La route nous a donc ramené dans la périphérie de Gori, où cette fois nous avons bifurqué vers l'Est, suivant le fleuve Koura qui traverse une bonne partie du pays dans sa largeur.
Notre étape suivante se trouvait d'ailleurs sur les rives de ce cours d'eau à une dizaine de kilomètres de là. Un village troglodyte ancestral taillé dans les falaises bordant le fleuve.
Ce site est situé dans une zone désertique très aride, la route pour y mener fait réellement penser à un désert, un paysage presque totalement minéral si ce n'est quelques touffes de buissons desséchés ici et là. Tout est jaune et sablonneux, le 4x4 laissant des nuages de poussière opaque sur son passage.
Uplistsikhe est une cité creusée sous terre datant de plus de 3000 ans et habitée jusqu'au début des années 1900. Le gouvernement en a aujourd'hui fait un site classé qu'il est possible de visiter. Mais comme à Gori, nous avons découvert en arrivant une barrière sur la route, avec une affiche signalant la fermeture du site à cause du Coronavirus. 2ème échec de la journée, nous commencions à ressentir une certaine frustration. 
Non loin de cette barrière, deux vendeurs avec leurs petits étals semblaient vouloir persévérer dans leur commerce ici malgré la fermeture, espérant sans doute vendre à des gens comme nous, qui viendraient sans savoir que le lieu est inaccessible. 
Ces deux hommes vendaient quelques sachets de fruits secs et du jus de fruit pressé à la demande, nous en avons d'ailleurs acheté chacun un, mélange de jus de grenade et d'oranges pressées à la main devant nous.
Le plus ancien des deux insista pour nous faire gouter un alcool artisanal local vendu dans des bouteilles d'eau réutilisées. Nous doutant du contenu des bouteilles pour avoir déjà pu apprécier divers alcools "maison" en Roumanie et en Bulgarie, nous avons laissé à Pierrick le plaisir de déguster en premier cette boisson. Comme prévu c'était fort, très alcoolisé, et il manqua de s'étouffer sous nos sourires et le rire franc des deux camelots. Finalement après l'avoir goûté à mon tour, je l'ai trouvé plutôt bon, moins "violent" que la Palenka roumaine, qui ressemble plus à du kérosène qu'autre chose, et surtout avec un vrai gout fruité. 
Après avoir échangé quelques mots, tant bien que mal, nous avons fini par leur acheter une bouteille en prévisions des froides soirées dans le Caucase, puis nous avons fait demi-tour, reprenant notre route vers l'Est.
Sur ce trajet nous avons traversé pas mal d'environnements différents, à commencer par la zone désertique que nous avons quitté en traversant un pont militaire installé à coté de l'ancien pont suspendu totalement effondré. Ce pont militaire sensé être provisoire semblait être là depuis plusieurs dizaines d'années et je pense qu'il restera encore longtemps en place vu l'état du réseau routier dans le pays. Les autorités ne semblent pas empressées, ou n'ont pas les moyens, d'entretenir les infrastructures qui pour la plupart datent de l'ère soviétique. Constructions solides qui finissent quand même par subir le poids des années, ce qui fait qu'aujourd'hui le bitume est défoncé quand il existe sur les routes, les ponts sont délabrés et la signalisation est réduite à son strict minimum.
Seule l'unique autoroute reliant la côte à la capitale, traversant le pays dans sa largeur et passant par les peu nombreuses "grandes" villes du pays, semble entretenue et en parfait état. Il faut dire que vu le nombre de camions qui transitent entre les ports industriels à l'Ouest et la capitale, ainsi que les frontières à l'Est, il est impératif d'avoir des infrastructures en bon état sur ce parcours.
Nous avons aussi été bloqués plusieurs fois derrière des troupeaux de vaches ou de moutons, menés par leurs bergers à l'œil placide, ignorant royalement notre présence. Nous avons aussi croisé, comme en Roumanie, des gens se déplaçant en charrettes tirées par des bœufs ou plus souvent par de petits ânes bruns.
Notre objectif était Mtskheta, petite ville en plein centre du pays un peu au dessus Tbilissi, haut lieu historique et religieux de la Géorgie. Avant d'arriver, la route nous a fait passer sur les hauteurs bordant une immense plaine où se dessinait à l'horizon la silhouette des contreforts de la chaine du Caucase. Nous avons fait une pause pour observer ce panorama, difficile à appréhender du regard tellement l'étendue était immense, et encore bien plus avec mon appareil. 
Sentiment de frustration qui m'arrive toujours quelques fois en voyage, quand je me trouve devant un panorama ou une scène particulière, si singulière ou aux proportions si énormes que je sais d'avance qu'aucune photo ne saura rendre l'immensité du lieu et de ses perspectives. J'essaie toujours néanmoins, ne serait-ce que pour mon souvenir, mais rien qu'en regardant sur l'écran boitier de l'appareil, je vois déjà que ma photo sera bien en dessous de la réalité.
Arrivés dans le centre de Mtskheta, nous avons laissé le 4x4 sur un parking non loin de la cathédrale pour aller la visiter, tapie derrière ses murs  fortifiés, ainsi que ses jardins et le centre ville médiéval tout autour. Elle reste une petite ville, perchée au sommet d'une falaise surplombant la rivière Koura et son affluent qui se rejoignent juste à cet endroit. Très touristique et axée sur la religion, avec de nombreux bâtiments et monuments chrétiens à visiter dans la vieille ville.
Il y a aussi énormément de "boutiques à touristes" fast-foods, magasins de souvenirs et autres bibelots pour touristes, qui brisent le charme du centre ville antique parfaitement préservé et entretenu.
L'intérieur de la cathédrale était particulièrement sopmtueux, comme toujours dans les églises orthodoxes où le décor est souvent chargé de dorures et de boiseries en tous genres.
La ville étant trop touristique à notre goût, nous avons fait notre petit tour pour "voir" ce qu'il y avait à voir, puis sans nous attarder nous sommes repartis juste à la sortie de la ville par le Nord, pour aller jeter un oeil une tour de guet en ruine juchée un piton rocheux qui surplombe la rivière en contrebas.
L'endroit était totalement laissé à l'abandon et nous y étions seuls et depuis le haut de la muraille nous avions une superbe vue sur le delta et la ville un peu plus bas.
Nous avons ensuite rapidement mangé un morceau au pied de cette tour avant de traverser le cours d'eau pour rejoindre la montagne située juste en face de Mtskheta.
Au sommet de ce pic surplombant la rivière se trouve un autre monastère, celui de Djvari; très touristique, il y avait énormément de monde sur le site, donc nous avons simplement fait un petit tour à l'intérieur, et surtout profité de la vue sur la ville en face de nous et le paysage montagneux découpé par les cours d'eaux bleutés.
Sans plus nous attarder, nous sommes ensuite repartis en direction de Tbilissi, la capitale, à moins d'une heure de route au Sud en empruntant l'unique autoroute du pays. J'ai d'ailleurs été surpris de voir des panneaux indiquant la direction de Téhéran, me rappelant soudain que nous n'étions pas si loin que ça du Moyen-Orient.
Dès notre arrivée dans la ville, nous avons été déposer nos sacs de voyage dans le logement que nous avions loué pour la nuit, dans un quartier résidentiel non loin du centre-ville. Un vaste appartement resté figé dans les années 80, avec une belle dose de kitsh.
Laissant le 4x4 dans la rue, nous sommes repartis à pieds visiter la ville.
Tbilissi n'est pas si grande si on la compare à une capitale européenne, tout le centre se visite à pied en une heure ou deux à peine, et c'est tant mieux. La ville est traversée par le fleuve Koura, le même qu'à Mtskheta. Le centre historique est assez diversifié, mélangeant une quantité impressionnante d'édifices religieux, des zones "sovietisées" dans les années 60 et quelques rares immeubles modernes. La vie y semble agréable, loin de la frénésie qu'on attendrait dans une capitale, énormément de boutiques on gardé leur aspect et leurs fonctions traditionnelles, comme des tisseurs de tapis, des apothicaires ou encore de la cuisine de rue.
Nous avons commencé la balade par la "place de la liberté" à l'ambiance soviétique, puis les petites rues du centre historique, la cathédrale et enfin nous avons traversé le pont pour aller observer les rives et les quais du fleuve.
Tbilissi est bâtie sur une zone à forte activité géologique, qui produit de nombreuses sources d'eau chaude sulfurées. Il existe donc de nombreux "bains" en ville, établissements de toutes tailles proposant de faire trempette dans cette eau chaude. 
Le plus ancien établissement de la ville, "Bains N°5", date de l'époque romaine, et nous avons décidé de finir la journée en y allant.
En sous-sol, pour à peine 3€ nous avons eu accès à un salon avec un thé servi et la salle privée des bains, elle même comprenant 2 bassins, un chaud et un froid. Le chaud était si brulant que j'ai bien dû mettre 10 minutes avant d'arriver à m'y immerger tandis que Louis et Pierrick avaient réussi à y entrer bien plus vite. Il était encore plus chaud que celui que j'avais pu tester à la Dominique.
Après s'être pris pour des romains pendant une petite heure, nous sommes ressortis délassés par cette pause improvisée pour aller diner dans un petit restaurant à coté de notre logement. Nous avons pu découvrir une des spécialités géorgiennes, les rinkhalis, une sorte d'énormes raviolis, remplis de viande en sauce. Le genre de plat dont on se gave jusqu'à ne plus pouvoir se lever de sa chaise. Puis nous avons fini la soirée à l'appartement, à boire quelques verres de la chacha achetée devant la cité troglodyte.
3ème JOUR: Reliques de l'URSS et traversée du désert
Comme d'habitude nous nous sommes levés aux aurores, pour partir rapidement du logement et profiter de la journée.
Avant de quitter la ville nous avons déjeuné dans un café (le Radio Café) avant de traverser à pieds un des nombreux ponts qui enjambaient la rivière car nous avions aperçu un genre de brocante de l'autre coté.
Nous nous y sommes baladés tout un moment, découvrant avec curiosité des reliques de l'ère soviétique qui abondaient sur les petits étalages. 
Je pense que les locaux ont conscience de la curiosité des occidentaux pour cette période, et mettent en avant pas mal d'objets de cet univers. J'ai fini par acheter une médaille militaire soviétique ainsi qu'un étuis à passeport gravé des lettres SSSR et de la faucille et du marteau.
Louis s'est procuré des roubles de la même époque et Pierrick est reparti avec un appareil photo reflex Zenith complet et fonctionnel, âprement négocié.
On y trouvait aussi un bic-à-brac improbable, comme des peaux d'ours, des massues de combat, des armes à feu de la 2ème guerre mondiale et bien d'autre choses dont on n'avait aucune idée de l'usage.
Une fois cette petite balade matinale terminée, nous sommes sortis de la ville en direction de l'Est. Pour cela nous avons emprunté la route principale qui longeait la rive nord du fleuve, nous permettant de saisir quelques points de vues sur la ville sous la lumière matinale.
Ayant dépassé Tbilissi, nous commencions à nous enfoncer dans les coins les plus reculés du pays, cela se remarquait notamment quand nous traversions les quelques villages sur notre route, semblant sortir d'un autre temps. Quasiment aucune technologie n'était visible, ni voiture, ni câbles électriques ou téléphoniques, pas la moindre publicité, ni le moindre commerce moderne.
Après une heure de route, nous avons fait un arrêt à coté de Ninotsminda, aux pieds des montagnes, pour découvrir une cathédrale en ruines, bien cachée derrière ses murailles. Le couvent attenant à l'ancienne cathédrale est toujours actif, et nous avons dû demander leur autorisation pour pouvoir pénétrer dans l'enceinte.
La cour était au final assez petite et les ruines trônaient au beau milieu de celle-ci, impressionnantes. Certaines voûtes toujours debout abritaient encore quelques peintures moyenâgeuses et les sœurs déambulaient tout autour pour vaquer à leurs occupations, nous ignorant totalement. L'endroit étant assez petit et ayant le sentiment diffus de déranger les religieuses, nous ne sommes pas restés très longtemps. Juste le temps de faire le tour, observer les ruines, les murailles et le clocher, avant de retourner saluer et remercier la Bonne Sœur à l'entrée.
Le moment était venu d'aborder une de nos étapes majeures de ce périple: traverser les steppes désertiques au Sud du pays pour aller découvrir le monastère de David Gareja, juché sur la crête montagneuse qui sert de frontière entre la Géorgie et l'Azerbaïdjan. Sur cette partie là, la destination avait autant d'importance que le trajet, j'avais hâte de découvrir ces paysages déserts.
En quittant la cathédrale, nous avons aussitôt bifurqué en direction du Sud, quittant la route principale et le peu de civilisation encore visible le long de celle-ci.
Dès que nous avons emprunté cette route en terre battue, le paysage à commencé à changer, nous sommes entrés dans une immense plaine aride bordée par une ligne de collines toutes aussi désertiques à l'horizon. Nous avons parcouru la longue route en ligne droite qui fendait ce paysage lunaire pendant presque une demi-heure avant d'arriver au niveau de ces collines.
Ce paysage me rappelait vaguement les plaines désertiques que j'avais traversé au Maroc pour aller de Marrakech à Essaouira, la chaleur en moins.
Arrivé sur la crête de la ligne rocheuse, nous avons fait un arrêt pour observer le paysage que nous venions de traverser et prendre des photos, puis nous sommes repartis descendre l'autre versant et déboucher... sur une autre plaine, encore plus immense. Si la 1ère plaine contenait encore quelques rares traces d'activités humaines (poteaux électriques en bois, quelques cabanes..), celle qui s'étalait devant nous était totalement déserte et brute.
La route tournait vers l'Est, sur notre gauche, pour suivre le fond de la vallée et longer un lac qui était noté sur notre carte, mais en s'en approchant nous avons réalisé que celui-ci était totalement asséché depuis un bon moment. 
De loin, il formait une tâche claire qui tranchait dans le paysage brun, et je m'imaginais que c'était du sel qui formait cette "croûte blanche". Lorsque nous nous sommes arrêtés devant, et que nous sommes descendus marcher sur le fond du lac, j'ai réalisé que c'était en fait de la vase sèche qui formait une couche ressemblant énormément à de la cendre. On s'y enfonçait jusqu'aux chevilles par endroits et elle partait en fumée au moindre mouvement.
Nous y avons pris quelques photos, tout en marchant dans cette texture inhabituelle, avant de rebrousser chemin et tapant longuement nos chaussures couvertes de cette poussière collante.
Après ce lac nous avons franchi une petite colline arborée pour déboucher sur une nouvelle plaine, celle-ci était balafrée par une immense crevasse courant à perte de vue vers l'horizon. Nous sommes alors sortis de la route, passant le Duster en 4 roues motrices pour progresser dans la steppe et s'approcher de ce sillon.
Nous sommes ensuite revenus sur la route, plus ou moins parallèle à ce rift avant de bifurquer vers le sud brusquement et nous amener à descendre le bord du plateau où nous étions. Au loin se devinait un petit village, Udabno. Absolument désert, nous l'avons traversé au ralenti à cause des chevaux sauvages qui déambulaient le long du chemin. 
Nous n'y avons pas vu âme qui vive, ni même aucun signe de vie, pas de voiture, de commerce ou quoi que ce soit. Le village se résumait simplement à quelques bâtisses sommaires assez anciennes, un bar fermé et tout autour des bâtiments en béton préfabriqués. 
J'apprendrai plus tard qu'Udabno est en fait une cité "saisonnière" servant de dortoir aux travailleurs venant s'occuper des troupeaux de bétail appartenant aux ranchs disséminés dans les collines, hors de notre vue.
A la sortie de la ville, les plaines désertiques reprenaient aussitôt, les chevaux étaient de plus ne plus nombreux dans le paysage, certains en petits groupes, occupés à brouter les herbes sèches, et d'autres au loin, formant de véritables troupeaux qui galopaient en créant des nuages de poussières visibles de très loin.
Je suis descendu pour tenter de me rapprocher de certains et en saisir quelques images, mais farouches, ils sursautaient dès qu'ils m'apercevaient et détalaient en un éclair.
Quelques kilomètres plus loin, le paysage commença enfin à changer, de plus en plus de collines se dessinaient autour de nous, des crevasses barraient le décor jusque là monotone. Le chemin devint moins linéaire, contournant les massifs rocheux, laissant deviner les prémices des montagnes qui nous attendaient un peu plus loin au niveau de la frontière.
Finalement, au bout de ce périple de plus de 2 heures (en comptant les arrêts photos), nous avons fini par arriver au monastère de David Gareja tant convoité. 
A flanc de montagne, il est à peine à quelques dizaines de mètres de la frontière située sur la crète rocheuse qui le surplombe. Devant lui s'étalent les "Rainbow Mountains", que nous avions longées en arrivant.
Ces Rainbow Mountains sont un ensemble de collines rocheuses au fond de la vallée, composées de diverses couches de minéraux de toutes les couleurs, formant donc un effet de vagues de pierre multicolores.
Nous avons ensuite visité le monastère qui est en accès libre et totalement désert, hormis quelques prêtres aperçus brièvement devant les habitations troglodytes à coté du monastère proprement dit. 
Avec le grand soleil que nous avions et l'environnement aride, le monastère nous faisait penser à un fort mexicain, sa muraille défensive et même quelques cactus qui poussaient ici et là renforçaient encore l'effet.
L'édifice est un enchevêtrement de bâtiments, que l'on parcourt via de nombreux petits couloirs, des escaliers étroits et tortueux, des coursives qui débouchent sur des petites terrasses ou des salles sombres, avant de replonger dans les entrailles de la montagne pour finalement déboucher sur la cour centrale depuis laquelle on peut accéder à l'église, partiellement creusée dans la roche elle aussi.
Nous avons ensuite voulu grimper jusqu'à la crète montagneuse qui surplombait le monastère pour en avoir une belle vue d'ensemble. En faisant le tour des murailles par l'extérieur nous avons aperçu des silhouettes qui se déplaçaient en groupe sur cette crète, pensant à des groupes de randonneurs, nous avons continué à progresser parmi la rocaille et les buissons secs en suivant un petit chemin de terre qui semblait mener vers le sommet.
Au détour d'un buisson, nous sommes tombés sur 2 militaires Géorgiens armés, planqués à l'ombre d'un réservoir d'eau désaffecté. L'air patibulaire, ils nous ont fait signe de redescendre sans prononcer un seul mot. 
Pierrick et Louis sont venus à leur rencontre et ont demandé s'il était possible de monter sur la crète qui nous surplombait.
Un des militaires nous expliqua tant bien que mal que la crête était inaccessible car des militaires azerbaidjanais y patrouillaient, les "randonneurs" que nous avions aperçus un peu plus tôt. Cependant il était quand même possible de grimper encore un peu, jusqu'à une petite grotte abritant une source sacrée, d'où on pouvait avoir une vue sur le monastère.
La grotte, au final un simple creux dans la roche, était sans intérêt particulier, un petit bassin d'eau de source et une grille tout autour pour en empêcher l'accès. Cependant la vue sur le monastère en contre-bas et les collines en arrière-plan valait la grimpette que nous venions d'effectuer.
Lorsque nous sommes redescendus, nous sommes repassés devant les deux militaires qui montaient la garde assis derrière le mur en béton du réservoir. Pierrick alla vers eux et engagea la conversation, parlant de son passé militaire (avec le recul ce n'était pas forcément une bonne idée de parler de ça sur une zone de conflit à l'étranger). Puis il demanda s'il était possible d'avoir une photo avec eux. Un des deux mecs accepta et vint à coté de Pierrick pour que je les prenne en photo. Au dernier moment il se ravisa, retourna poser son arme et revint poser sans elle.
Pierrick le remercia et après une poignée de mains, nous avons continué notre descente pour revenir au 4x4.
La présence de ces militaires s'expliquait par un conflit de longue durée entre l'Azerbaïdjan et la Géorgie à propos d'un désaccord sur la frontière, notamment au niveau de la zone où nous étions. Chaque pays revendiquant la propriété de la montagne et des sites historiques qui s'y trouvent.
Revenus à l'ombre des murs du monastère, nous avons été marcher un peu plus bas pour observer les Rainbow Mountains de plus près tout en mangeant quelques fruits. L'occasion de faire d'autres photos de ce paysage si singulier.
Finalement nous avons fini par repartir, reprenant le chemin inverse à travers les steppes et les collines arides pour retomber quelques heures plus tard sur la route principale et la suivre en direction de l'Est.
Sur notre route, nous avons croisé un apiculteur garé sur le bas coté et qui vendait son miel depuis l'arrière de son camion. Louis étant apiculteur, et s'intéressant aux diverses variétés de miel (suivant la végétation des pays notamment), nous nous sommes arrêtés pour aller voir ça de plus près et il finit par repartir avec 2 énormes potes de miel artisanal payés à peine quelques euros.
Notre "arrêt" suivant, le dernier pour la journée, consistait en une rapide halte au niveau de la ville de Sighnaghi, ville juchée sur un plateau montagneux, réputée pour ses points de vues sur la chaine du Caucase qui lui fait face plus au Nord.
Après avoir traversé le centre-ville ancien, nous nous sommes dirigés vers la muraille d'enceinte qui surplombe une falaise et fait face à l'immense plaine qui s'étale tout en bas, ainsi que les montagnes à l'horizon. En grimpant dessus à la tombée du jour, nous n'avons au final pas vu grand chose. Un brume épaisse au dessus de la plaine bloquait toute la vue, et diffusait une lumière laiteuse au fur et à mesure que le soleil disparaissait. Tant pis, nous verrons ces montagnes une fois que nous y serons.
Enfin, pour terminer cette longue journée nous avons encore roulé vers l'Est, quasiment jusqu'à la frontière du pays, pour atterrir dans un petit hôtel familial planqué au fond d'une forêt, à coté du village de Lagodekhi. Fatigués et affamés, nous avons été invités par le propriétaire à boire un verre de chacha, et réalisant qu'il faisait aussi restaurant, nous avons diné sur place. 
Rapidement d'autres personnes sont arrivées pour manger aussi, et nous nous sommes retrouvés sous une véranda assez animée, où le propriétaire revint plusieurs fois remplir nos verres de chacha et finit par nous laisser sa bouteille. Je suis sorti dehors à la fin du repas, et le froid mordant m'a surprit, contrastant fortement avec les températures douces des steppes.
4ème JOUR: Le Caucase et ses villages isolés
Ce matin là, nous avions prévu d'aller voir un lac situé dans les montagnes au dessus de la ville, non loin de la frontière avec l'Azerbaïdjan. Le "Black Rock Lake", un lac glaciaire offrant un panorama saisissant sur les montagnes qui le ceinturent de part et d'autre, était sensé se trouver à 4kms du village, avec une randonnée assez simple pour y accéder.
Après avoir déjeuné à l'hôtel, nous sommes redescendus au village que nous avons traversé vers le Sud, tout en suivant le GPS sensé nous mener sur la route du lac. Nous sommes finalement arrivés à la sortie de la ville, directement à la frontière située au niveau d'un rivière, et plus précisément sur le pont qui l'enjambe.. Nous sommes descendus faire quelques photos des panneaux frontaliers, et observer de loin les militaires du poste frontalier effectuer leurs rondes.
Suivant toujours notre GPS, nous avons bifurqué juste avant le poste frontière pour se retrouver au milieu d'un champ où nous avons fait demi-tour, réalisant que l'itinéraire du GPS était erroné.
Depuis le champ, le poste frontière était visible, et eux non plus n'ont pas manqué de nous remarquer, bientôt 4 ou 5 gardes sont sortis de la guérite pour nous observer manœuvrer dans le champ.
Deux minutes plus tard, alors que nous revenions sur la route. Un pickup de l'armée Géorgienne est venu à notre rencontre, nous barrant la route. Le conducteur, parlant un peu anglais nous questionna, savoir ce que nous faisions à rôder à proximité de la frontière. Il prit vérifia passeports pendant que nous lui expliquions notre erreur de GPS, constata que nous étions français, et nous intima de partir d'ici sans plus insister. Evidemment nous n'avons pas insisté dans ce coin, et sommes reparti vers le centre ville, après avoir eu peur d'avoir des complications qui auraient mis des heures à être démêlées. 

Une fois cette petite mésaventure finie, nous nous sommes arrêtés sur le bord de la route pour chercher la bonne localisation du lac. Louis a fini par la trouver dans son guide du Routard, au final ce fameux lac ne se trouvait pas du tout à proximité, et était relativement inaccessible ( plus de 2h de route et 5h de randonnée). Nous avons donc laissé tomber l'idée d'y aller, en consultant les cartes nous avons remarqué qu'une cascade se trouvait légèrement au Nord de notre position, à la naissance des montagnes.
Trente minutes de route plus tard, après avoir traversé de nombreux chemins agricoles, nous sommes arrivés au départ d'un sentier de bergers qui s'enfonçait dans la forêt. Nous avons aussitôt commencé à progresser sous les arbres, longeant un petit ruisseau qui s'avéra provenir du trop plein d'un réservoir d'eau servant probablement à irriguer les champs en contrebas. Intrigué, en un saut je suis monté dessus, manœuvrant la vanne d'urgence pour observer le débit d'eau glaciale qui en jaillissait.
Quelques centaines de mètres plus loin, le chemin rejoignait le lit d'une très large rivière asséchée jonchées de roches et de galets. Le lit devait facilement faire une centaine de mètre de large, mais pour le moment seul un mince filet d'eau serpentait, discret, parmi les pierres grises. Nous marchions littéralement sur le fond du cour d'eau.
La cascade de Ninoskhevi se trouvait à environ 4kms de marche de notre point de départ, nous avons progressé sous un joli soleil matinal, arpentant le lit de la rivière, en devant parfois franchir des roches qu'il nous fallait escalader. L'effort nous réchauffa vite et Pierrick prit un peu d'avance, tandis que Louis et moi, faisions des arrêts photo.

Finalement nous avons rejoint Pierrick qui se retrouvait bloqué par le cours d'eau, difficilement franchissable au niveau où il était, nous empêchant de progresser. Après avoir essayer de passer de diverses manières, notamment en tenant de créer un gué en jetant des pierres dans l'eau, nous avons fini par décider d'abandonner. Car même en revenant sur nos pas, il n'y avait aucun moyen de franchir le cours d'eau, ni de le contourner à cause de la falaise qui le bordait à sa gauche.
Dans l'absolu nous aurions sans doute pu le franchir, mais cela aurait impliqué de tremper nos chaussures et une partie de nos pantalons, au vu des températures et de la longue journée qui nous attendait, ce n'était pas envisageable.
Nous avons donc rebroussé chemin, sans voir la cascade, qui devait de toute façon probablement être tarie, vu le peu d'eau présent dans la rivière à ce moment là. Néanmoins la marche avait été belle et agréable, les paysage caillouteux, bruts m'avaient beaucoup plus et il est vrai que j'aurais sans doute aimé poursuivre notre chemin encore un peu pour profiter de l'endroit.
En revenant à l'entrée du sentier, nous sommes tombé sur deux bergers qui bavardaient tranquillement appuyés sur un antique 4x4, tandis que quelques moutons broutaient ici et là dans la prairie. 
Nous leurs avons fait signe de la main, puis nous avons reprit le Duster pour continuer notre itinéraire de la journée.
Nous avons continué à rouler vers le Nord, dans la plaine qui longeait le pied des montagnes, traversant divers villages et paysages agricoles, où l'ont voyait beaucoup plus de bétail et de champs cultivés qu'autour de Koutaïssi ou Tbilissi.
Nous avons fait une rapide halte devant des camions garés au bord de la route où quelques marchands vendaient des fruits et des légumes, pour leur acheter un kilo d'oranges, que nous mangions tout le long de nos journées.
Le réservoir d'essence commençait à se vider, et nous avons alors commencé à guetter sur notre route une station-service, en réalisant bien vite qu'il n'y en avait pas tant que ça dans la région. Au final en arrivant à l'entrée de Gremi, notre point de chute, nous avons enfin trouvé de quoi faire le plein. Puis nous avons traversé le village pour aller voir à sa sortie Nord la majestueuse Eglise fortifiée bâtie sur un piton rocheux, dominant toute la vallée devant elle.
Après une petite grimpette pour escalader le monticule où elle était juchée, nous avons pu accéder à l'enceinte de cette antique église, bâtiment religieux majeur de la région. Son histoire guerrière est apparemment assez intense. Lorsque nous l'avons visitée, elle était à ce moment là partiellement en travaux de rénovations, mais nous avons tout de même pu accéder aux terrasses pour observer le panorama sur les plaines, ainsi qu'à l'intérieur, toujours aussi chargé que les autres églises orthodoxes. Un prêtre qui surveillait le site nous demanda simplement de ranger nos appareils afin de respecter la quiétude du lieu. Ce que nous fîmes sans broncher. 
En revenant une dernière fois sur les terrasses, nous avons rencontré 4 français d'un certain âge, qui étaient là aussi en visite. Nous avons échangé quelques mots avec eux tout en marchant. Ils nous expliquèrent qu'ils adoraient la Géorgie et y venaient au minimum une fois par an depuis des années, aussi bien l'été que l'hiver, découvrant le pays dans le moindre de ses recoins.
Après avoir échangé quelques conseils de visite, nous avons pris congé et sommes repartis au 4x4, garé en contrebas.
 la Nord de la vallée de Pankissi, où nous nous trouvions était classé comme "zone formellement déconseillée" par le ministère des affaires étrangères français en raison de la présence d'islamistes radicaux dans plusieurs villages. 
Par conséquent, nous n'avons pas trop trainé dans la zone, et nous sommes repartis vers l'Est, en coupant à travers un petit massif montagneux, pour rejoindre la route qui menait au cœur des montagnes du Caucase.
Après avoir franchi le petit massif montagneux, nous nous sommes retrouvés dans une seconde vallée bien plus étroite et rocailleuse, où les montagnes autour de nous commençaient à s'élever de plus en plus haut.
Cette vallée déboucha sur les hauteurs de Zhinvali, ville industrielle s'étalant sous nos yeux au pieds de la montagne. Nous avons fait un arrêt au bord de la route, le temps de faire quelques photos du panorama. 
Puis nous avons bifurqué vers les montagnes au Nord juste au dessus de la ville, où le lac de Zhinvali, en fait un réservoir derrière un barrage qui a noyé trois vallées, nous dévoilait son paysage si singulier.
Le niveau du lac était bas lorsque nous sommes arrivés face à lui. La scène était vraiment magnifique à admirer depuis le promontoire où nous nous étions arrêtés, d'une part à cause des dimensions immenses du lac et des montagnes qui y plongeaient, le genre de panorama où le cerveau à du mal à réaliser les proportions de ce que l'on regarde, mais aussi à cause des différentes couleurs qui composaient le décor: le bleu du ciel, le bleu turquoise laiteux de l'eau et entre les deux, les montagnes d'abord couvertes d'une végétation d'un brun rougeâtre uniforme, puis, là où le niveau de l'eau avait baissé, le blanc des sédiments séchés au soleil. Cet empilement de couches de couleurs donnait un rendu très "esthétique" à l'endroit.
Nous fûmes bientôt rejoints par deux voitures de Géorgiens venus pique niquer au bord de la route, bruyants et qui attendaient visiblement que l'ont dégage pour pouvoir s'installer. Nous avons donc pris nos photos et sommes repartis, continuant notre itinéraire vers le Nord.
Un peu plus loin sur la rive Ouest du lac se trouve Ananouri, petite village qui se traverse après avoir franchi un pont très haut au dessus d'une gorge. L'intérêt principal de cette bourgade réside en une Eglise fortifiée érigée sur un rocher qui surplombait jadis la vallée, aujourd'hui le lac. L'endroit est joli, avec toujours ce patchwork de couleurs en arrière plan.
Nous avons visité l'église et les jardins, mais j'y ai pas fait de photo car les prêtres qui étaient présents en nombre sur le site me l'ont formellement interdit. 
Notre route continua vers là Nord, après avoir dépassé le lac, nous avons réellement commencé à nous enfoncer dans les montagnes, les vallées se creusaient, la végétation se raréfiait et la route commençait à se transformer en un vraie route de montagne, avec des précipices de plus en plus profonds sur notre droite. 
Cette route est une des rares routes qui fait la liaison à travers le Caucase, jusqu'à la Russie, par conséquent c'est une route extrêmement fréquentée par les poids-lourds et les transporteurs de fret en tout genre.
Louis aperçut sur le bord de la route, au détour d'un virage, un petit étal où se vendait du miel. Nous nous sommes donc arrêtés à coté pour jeter un œil. C'est un adolescent d'à peine 15 ans qui nous accueilli et voyant que nous étions étranger, essaya aussitôt de nous vendre tout et n'importe quoi. 
Louis s'approcha des seaux de miel, pendant que le vendeur nous expliquait tant bien que mal dans un anglais approximatif que c'était du miel traditionnel qu'il récoltait lui même. 
Quelque chose intrigua Louis et ils nous appela pour nous montrer ça: Du miel de framboisier rosé. Il nous expliqua qu'en aucun cas du miel pouvait prendre la couleur du fruit, car c'est sa fleur qui est butinée, et non le fruit en lui-même. Ce qui voulait donc dire que ce miel, et probablement les autres, étaient en fait du miel "de base" mélangé à du sirop aromatisé pour lui donné des gouts différents.
Comme nous le découvrirons plus tard, ce genre d'étalage était assez fréquent et ils vendaient tous exactement les mêmes produits et les mêmes miels avec ces fameuses "saveurs". C'était typiquement le piège à touristes du coin, où le voyageur mal renseigné pensera acheter du miel artisanal de la région, alors qu'il s'agit ni plus ni moins que de miel industriel coupé aux arômes artificiels.
La route que nous suivions s'appelait la "Khada Road" ou "la route militaire", car ce parcours sinueux qui franchit les montagnes du Caucase est une route historique ayant été créée parles armées Géorgiennes, notamment lors de la période d'expansion du Christianisme. A l'origine elle fut créée pour permettre le passage des troupes vers la Russie actuelle, et était bordée de forts et de tours de gardes à intervalles réguliers. On peut toujours en apercevoir des ruines ici et là, sur les hauteurs de la vallée.
Aujourd'hui cet itinéraire est toujours très fréquenté par les camions de fret qui vont et viennent de part et d'autre de la frontière. Seulement, les relations diplomatiques entre la Russie et la Géorgie se sont  dégradées depuis plusieurs années, notamment cristallisées autour de l'annexion de deux provinces Géorgiennes par la Russie. Ce qui fait que régulièrement, suivant le niveau de tension du jour, la frontière se ferme. Bloquant les camionneurs qui créent alors d'interminables files le long de la route, puisque strictement aucune infrastructure ne leur permet de les accueillir le temps que les postes frontières réouvrent. C'est justement sur une de ces interminables embouteillages que nous avons pu voir lors de notre avancée. Nous avons remonté la file des camions sur une dizaine de kilomètres, sachant que la frontière se trouvait encore à presque 30 kilomètres de là où nous étions.
Au fil de notre progression, la neige commençait à se montrer, des parcelles de neige se montraient de plus en plus nombreuses sur les versants ombragés des montagnes autour de la route.
Juste après avoir dépassé le village de Kvesheti, à peine quelques maisons de bois au bord de la route et un relais routier, nous avons bifurqué sur un chemin de terre à notre droite, vers le Nord. Celui-ci descendait abruptement vers le fond de la vallée, pour longer la rivière qui s'y trouvait. 
Nous avons dépassé quelques baraques en piteux état et il a fallu slalomer entre les animaux de basse-cour qui se baladaient librement au milieu de la voie. Quelques personnes à l'extérieur nous regardèrent d'un air mi-étonné, mi-méfiant lorsque nous avons traversé le groupe de maisons tapies au fond de cette étroite vallée semblant constamment à l'ombre des montagnes.
A peine 200 mètres plus loin, le chemin semblait s'arrêter brusquement. Et là, subitement le paysage changeait du tout au tout. Nous arrivions dans le fond de la vallée, de plus ne plus étroite avec des falaises très abruptes de part et d'autre. Tout était couvert de neige, alors que 50 mètres en arrière il n'y en avait pas trace.
En observant un peu, et en s'aidant du GPS, nous avons fini par trouver la piste couverte de neige elle aussi qui suivait le lit du ruisseau. Nous avons passé le Duster en quatre roues motrices puis nous nous sommes engagés prudemment.
Progressant lentement sur le sentier verglacé, nous nous sommes enfoncés dans le fond de la vallée où la voie commençait doucement à s'élever en contournant des affleurements quasiment verticaux. Une rivière qui descendait d'une des montagnes traversait la route, formant un gué que nous avons passé sans difficulté avec le 4x4, la glace craquant sous les pneus.
Une fois la rivière franchie, la route à commencée à devenir franchement escarpée, grimpant sur le flanc de la montagne, avec des crevasses de plus en plus importantes qui nous obligeaient à manœuvrer pour progresser. Au détour d'un virage, une cascade dans un renfoncement s'est offerte à notre vue. Je suis rapidement descendu pour la photographier, puis lorsque je revenais au 4x4, un cavalier est passé d'un pas tranquille sur le chemin descendant de la montagne. 
Rare doivent être les véhicules motorisés à grimper cette route au beau milieu de nulle part. Mais indifférent à notre présence, il nous gratifia d'un discret signe de tête tout en continuant son chemin, disparaissant au virage suivant.
Au bout d'une petite heure, nous sommes parvenus aux abords d'un premier plateau où quelques ruines d'une tour de garde se dressaient encore face à la vallée que nous venions de parcourir.
Nous avons fait un bref arrêt pour observer les vieilles pierres et la vue, tandis que Pierrick, parti marcher un peu plus en amont du plateau, revint nous dire que des bâtiments en bois se trouvaient juste au dessus de nous.
Nous avons donc finit de grimper sur le plateau pour arriver sur une vaste étendue parsemée de bâtiments en bois peint, manifestement abandonnés. Nous nous sommes à nouveau arrêtés pour explorer l'endroit, qui était en fait un ancien village agricole, avec quelques maisons, des granges et une petite église en pierre entourée de son cimetière, juchée sur un promontoire, juste au dessus des ruines de la tour que nous venions de passer.
D'ailleurs en observant les environs, Louis a remarqué que de nombreuses autres tours, plus ou moins en ruines, étaient disséminées dans les hauteurs qui ceinturaient le plateau. Perchés sur les crètes, les antiques bâtiments militaires se découpaient dans le ciel blanc.
En me renseignant après notre retour, ce village composé de 2 groupes de maisons abandonnées et de son église, s'appelle Gomurni. 
Continuant notre progression dans un mélange de boue et de neige, un autre petit groupe de maisons, abandonnées elles aussi, mais en meilleur état, s'est présenté à nous derrière une colline: Beniani. A peine 4 ou 5 bâtisses de bois de part et d'autre du chemin, probablement abandonnées depuis un peu moins de temps que Gomurni. Nous ne nous y sommes pas arrêtés, poursuivant notre chemin vers le fond de la vallée.
Le chemin nous fit redescendre plusieurs fois au fond de la gorge qui devenait de plus en plus prononcée, pour franchir d'antiques ponts de pierre en très mauvais état, notamment un où de nombreux trous parsemaient la chaussée, par lesquels on pouvait voir la rivière bleutée qui coulait plusieurs dizaines de mètres en dessous. Nous les avons franchis avec beaucoup de prudence, avant que la route nous fasse remonter à la hauteur du plateau. Nous avons alors débouché sur un vaste cirque qui offrait une vue exceptionnelle: La rivière aux eaux plus bleues que jamais qui serpentait en plein milieu, les abords composés de pics rocheux acérés et enneigés, et au beau milieu, une petite colline qui surplombait la rivière, où se serraient plusieurs dizaines de maisons en pierre brute, avec quelques tours-greniers qui dépassaient les toitures.
A flanc de montagne, les rares zones exposées au soleil laissaient apparaitre une herbe d'un orange vif qui contrastait avec le blanc de la neige et le bleu opal de la rivière.
Encore une fois nous avons fait un arrêt ici, pour contempler la scène, puis nous avons rallié le village de Tskere proprement dit. Point final de cette route du bout du monde
Pierrick a stoppé le Duster à l'entrée du village, et nous sommes alors descendus, frappés par le vent piquant qui soufflait ici. Nous nous sommes dispersés, commençant à explorer les environs. Pour ma part, je suis allé grimper dans un champ en pente douce afin de prendre quelques vues d'ensemble, tandis que Louis s'approchait des habitations qui étaient serrées les unes aux autres, comme blotties pour braver le froid des hivers rigoureux.
A peine quelques minutes après notre arrivée, une vieille femme a surgit de nulle part avec un large sourire en venant à notre rencontre.  Louis qui était aux abords des maison vint à sa rencontre, suivi par Pierrick, je les vis au loin essayer de discuter, alors je redescendis pour les rejoindre.
En arrivant, je saluait la femme qui nous parlait en géorgien tout en accompagnant ses mots de grands gestes. Incapable de se comprendre, car nous ne parlions pas géorgien et elle ne parlait pas anglais et encore moins français, nous avons cependant réussi à communiquer à grand renforts de mimes. Au début un peu gênant, ce jeu devint vite amusant au fur et à mesure que le contact s'établissait malgré tout.
Elle nous dit s'appeler Tamara, et nous invita à la suivre, partant entre les maisons. Nous lui emboitèrent le pas, déambulant parmi les bâtiments, qui avaient tous l'air d'être plusieurs fois centenaires, tous faits de pierre brute, et avec de nombreuses extensions en bois. 
Nous sommes entrés chez elle, en passant devant sa petite étable sombre située au rez-de-chaussée de sa maison, où deux vaches placides nous regardèrent passer d'un œil indifférent. n
Nous entrâmes dans sa cuisine au sol en terre battue, à l'entrée un antique poêle à bois réchauffait la pièce. Une unique table avec 4 chaises trônait devant une petite fenêtre poussiéreuse et pour compléter le tableau, une vieille gazinière se tenait tout au fond. Elle nous fit signe de nous asseoir autour de la table, enjouée et souriante. 
Toujours sans prononcer un mot, elle s'affaira autour de la gazinière quelques minutes avant de venir nous servir trois grands verres de lait chaud qui, je le vis ensuite, provenait directement d'un seau de traite posé à coté de la porte du fond.
Elle disparu quelques secondes à petits pas empressés, et revint les bras chargés de nourriture: fromage, galettes de blé et un genre de pain qui ressemblait preste à de la pâte à tarte. Elle déposa le tout et nous invita à nous servir. 
Penauds devant un tel accueil, nous nous entre-regardâmes, et je me levais, disant que j'allais chercher la bouteille de chacha dans le 4x4. En deux minutes j'étais revenu, et je vis le sourire de Tamara lorsque je posais la bouteille sur la table. Elle sortit des verres que je remplis tandis que Pierrick et Louis avaient commencé à manger.
Tamara préféra gouter notre chacha, et pendant que nous déjeunions, nous avons recommencé nos tentatives de dialogues qui s'avérèrent laborieuses mais fructueuses. Nos gesticulations entrecoupées d'éclat de rires et l'aide du traducteur sur le téléphone de Louis nous permis de comprendre pas mal de choses au final:
Tamara nous expliqua notamment qu'elle vivait dans ce village depuis toujours, qu'à une époque chaque maison était habitée et que la plus part de ces habitants étaient des bergers qui s'occupaient de leurs troupeaux à même le cirque. Mais aujourd'hui il ne restait plus qu'elle et sa sœur, qui vivait dans la maison d'à coté et que nous n'avons pas vu du tout.
Elle était aussi très curieuse de savoir d'où nous venions, lorsque nous lui avons montré sur une carte la France, elle s'exclama, peut-être d'étonnement, mais toujours son éternel petit sourire aux lèvres. 
La Chacha ayant fait son effet, le dialogue devint un peu plus fluide et elle nous parla ensuite des légendes de la vallée, que nous avons eu plus de mal à saisir. L'histoire principale que nous avons pu comprendre était à propos de certains pics qui surplombaient le village, sacrés, où il était formellement interdit de grimper car c'était la maison des ou du dieu.
La douce chaleur du poêle nous réchauffait et nous avons au final passé une bonne partie de l'après-midi à discuter avec Tamara dans cette petite cuisine au plafond bas. Elle était visiblement très contente d'avoir de la visite, d'autant plus qu'elle nous avait aussi précisé qu'elle n'était pas redescendue de son plateau montagneux depuis très longtemps. 
Ici, sans voiture, la route que nous avions franchie en deux heures devient une odyssée à parcourir à pieds. Surtout à son âge. Elle semblait néanmoins heureuse de vivre ici, en quasi autarcie. Où l'électricité, l'eau courante et le téléphone n'existent pas. L'eau est puisée directement à la rivière et les poteaux électriques que nous avions vu le long de la route n'étaient que des vestiges militaires de la guerre froide, depuis longtemps hors d'usage. 
Lorsque nous avons réalisé que l'après-midi tirait sur sa fin, et surtout que le soleil commençait à baisser derrière les montagnes, enrobant le plateau d'une lumière rosée, nous avons décidé de repartir sans trop trainer car faire la route inverse de nuit aurait été très compliqué.
Au moment de rejoindre la voiture, Tamara nous accompagna jusqu'au pas de sa porte où nous avons fait quelques photos avec elle. Je proposais aux gars de laisser quelque chose à Tamara pour la remercier de son hospitalité en pensant notamment lui laisser de la nourriture que nous avions pour nos repas du midi.
J'allais alors lui préparer un sac avec un régime de bananes, un sachet de clémentines, une douzaine d'oeufs, diverses boites de thon, des briques de jus de fruits, que je vint lui rapporter et qu'elle accueilli avec un large sourire, particulièrement intriguée par les bananes.
Pour nous il serait facile de racheter ces quelques vivres, alors que pour Tamara qui ne sortait jamais de son village isolé, cela lui offrirait un bonus bien agréable.
Nous sommes restés quelques minutes pour admirer ce ciel si rose qui flamboyait au dessus des crètes enneigés, puis  après une dernière accolade, nous repartirent sur nos pas, descendant laborieusement la montagne alors que le soleil se cachait derrière les pics, plongeant le fond de la vallée dans l'ombre.
Ayant passé la journée dans des coins isolés, nous n'avions pas pu réserver notre logement du soir comme d'habitude. Du coup, une fois revenus sur la voie principale, la fameuse Khada Road, nous avons pris la direction de Gudauri, à environ 45min de là. Cette ville est une station de ski où le logements locatifs ne manquent pas, surtout que nous étions en fin de saison où les pistes n'étaient quasiment plus ouvertes.
Sur la route Pierrick a réservé en ligne un petit logement en plein milieu de la station. Nous avons attendu la propriétaire quasiment une heure, puis trente minutes supplémentaires pour qu'elle parvienne à déverrouiller la porte qui ne voulait pas s'ouvrir. Enfin nous avons pu nous poser dans ce petit studio à l'ambiance typiquement "station de ski" qui fleurait bon les années 70s.
Après un rapide repas au restaurant de l'hôtel voisin, nous nous sommes couchés épuisés.

4ème JOUR: La frontière russe
Au petit matin de cette quatrième journée, le ciel était dégagé et le soleil radieux rendait la neige presque aveuglante. N'ayant rien d'intéressant à faire sur Gudauri, nous avons rapidement repris la route, toujours en direction du Nord, toujours plus loin dans le massif du Caucase.
En suivant la route dans un environnement enneigé, nous sommes tombés à quelques kilomètres à peine de la station de ski sur un immense promontoire dans le plus pur style soviétique. Immense par ses dimensions, et l'intérieur recouvert de mosaïques si chères à l'architecture brutaliste.
En nous en approchant de l'édifice à pieds, nous avons alors réalisé que la route que nous suivions longeait un précipice vertigineux qui surplombait une vallée encaissée en contre-bas. La vue depuis le promontoire était absolument exceptionnelle. D'une part, cette vallée profonde parcourue d'une rivière sombre et de plusieurs lacs ovales d'un bleu intense, d'autre part nous avions un panorama incroyable sur une large partie de la chaîne montagneuse qui s'étirait dans toutes les directions sous nos yeux. La lumière douce et légèrement voilée du soleil levant adoucissait les ombres et donnait des tons pastels au paysage.
La scène était réellement à couper le souffle, nous l'avons contemplée longuement dans un silence absolu, où la neige semblait étouffer le moindre son, jusqu'au souffle du vent.
Un peu plus au Nord sur la route principale, nous avons bifurqué dans une petite vallée à l'Ouest, sensée nous mener à un petit village "reculé" dans le même genre que Tskere, ainsi qu'à un lac glaciaire dans les hauteurs alentours.
Au bout d'une vingtaine de minutes à parcourir un chemin de terre défoncé et traversé par quelques cours d'eau qui l'inondaient, nous sommes bel et bien arrivés à un autre antique village de pierre, totalement délabré, manifestement abandonné.
Non n'avons même pas eu le temps de descendre du Duster, car un militaire en planque derrière une guérite en sacs de sable nous a fait de grands signes et vint à notre rencontre armé, nous ordonnant de quitter les lieux.
Le type était manifestement très tendu et assez agité, nous avons donc fait demi-tour sans chercher à discuter, ni attendre que ses éventuels copains se pointent. En effet, en regardant plus attentivement la carte sur nos téléphones, Louis s'est aperçu que l'endroit était à quelques centaines de mètres à peine de la frontière de l'Océtie-du-Sud disputée entre la Russie et la Géorgie, et les tensions étaient à leur maximum au moment où nous y étions, d'où la présence de militaires surveillant la moindre vallée de part et d'autre de cette "ligne de front".
Revenus sur la route principale, nous avons poursuivi en direction du Nord, la voie toujours encombrée de nombreux camions souvent à l'arrêt. Les montagnes départ et d'autre de la vallée devenaient de plus ne plus immense au fil de notre progression. Toujours plus impressionnantes, nous sommes passés au travers d'immenses vallée où des lacs gelés étaient bordés par des antiques usines industrielles, datant probablement de l'ère soviétique et toujours en activité.
Plusieurs villages perchés sur des plateaux nous surplombaient, dominant la vallée et les cours d'eau qui apparaissaient un peu partout le long des pentes montagneuses. La neige était aussi de plus en plus présente et les températures descendaient presque à vue d'œil sur le thermomètre du Duster.
En Géorgie, comme dans de nombreux autres pays de l'ex-URSS, le réseau de gaz est très développé. A peu près partout des tuyaux jaunes de tailles diverses longent les routes pour acheminer dans le moindre foyer ce combustible abondant et fortement mis en avant sous l'ère soviétique. 
Les canalisations sont aériennes pour pouvoir les entretenir facilement, mais cela entraine toute une série de dangers en cas d'accident, notamment en cas de sortie de route d'une voiture.
Ces tuyaux peuvent parcourir des centaines de kilomètres, même par delà les montagnes, où chaque entrée de terrain privé se retrouve affublé d'un "portique" où la canalisation est surélevée pour permettre le passage des véhicules.
Nous avons subitement débouché dans une large vallée bordée à sa droite par des montagnes à la pente vertigineuse, qui étendaient leurs ombres matinales sur une ville industrielle tapie de part et d'autre de la rivière passant au milieu de la plaine.
Cette ville, Stephantsminda, aux allures de décor post-apocalyptique était surplombée sur le versant Ouest de la vallée par un immense pic rocheux où était perché une bâtiment religieux très populaire dans le pays: l'Eglise de la Sainte-Trinité de Guerguétie. 
Nous avons quitté la route principale en bifurquant sur notre gauche après avoir dépassé ce pic. La route sur laquelle nous étions à présent faisait face à la chaine de Caucase dans toute sa splendeur, tout particulièrement car pile en face de nous se trouvait le mont Kazbek, volcan endormi recouvert de neige culminant à plus de 5000m d'altitude. C'est le deuxième plus haut somment du Caucase géorgien, et le plus prestigieux car extrêmement difficile d'accès pour les alpinistes et entouré de nombreuses légendes locales.
Sur cette route nous avons à nouveau bifurqué quelques centaines de mètres plus loin, pour commencer l'ascension du pic où se trouvait l'église. Juste après avoir s'y être engagés, un minibus qui redescendait s'est arrêté à notre niveau, et le chauffeur nous expliqua que la route était impraticable à cause de la neige et qu'il valait mieux soit monter à pied soit qu'il nous y conduise avec son van adapté. Flairant la magouille pour nous faire payer le tour de navette, nous l'avons ignoré et avons remonté les lacets, effectivement enneigés et verglacés, mais nous sommes passés sans encombres avec les 4 roues motrices du Duster.
Arrivés en haut, nous étions les seuls présents sur le bout de terre qui servait de parking. En sortant du 4x4, nous avons eu une vue imprenable sur le Mont Kazbek. De l'autre coté se dressait majestueusement l'église de la Sainte Trinité, se découpant en contre-jour dans le ciel matinal.
Nous avons fini l'ascension à pieds pour arriver devant l'église, finalement de taille assez modeste. Une grande terrasse la ceinturait où le prêtre déambulait tranquillement dans la fraicheur matinale, bavardant de temps à autres avec les rares fidèles présents à ce moment.
Nous avons d'abord été visiter l'intérieur de l'église, particulièrement sombre et austère, où il faisait encore plus froid qu'à l'extérieur. L'intérêt de l'endroit se situait cependant dehors, où depuis la terrasse nous avions une vue spectaculaire sur la vallée en contrebas où s'étalait Stephantsminda, et en arrière plan les gigantesques montagnes verticales du Caucase qui projetaient leurs ombres sur la ville.
Nous sommes restés tout un moment à admirer la vue, assis sur une pile de dalles destinées à rénover la terrasse. L'endroit était silencieux, le soleil blanchâtre se levait doucement par dessus les montagnes, faisant monter une légère brume qui semblait accentuer l'atmosphère silencieuse de l'endroit.
Nous avons ensuite fait le tour pour contempler les montagnes au Nord, vers la frontière russe qui n'était alors distante que de quelques kilomètres. La masse imposante du Mont Kazbek se détachait dans le ciel, impressionnante.
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La frontière avec la Russie étant peu après cette vallée, nous ne pouvions guère aller plus loin, nous avons donc rebroussé chemin, redescendant la route entre les montagnes en direction du Sud. 
Nous avons fait une brève halte dans une épicerie pour faire quelques courses. En revenant vers Gudauri, nous nous sommes arrêtés devant un terrain vague où de nombreux véhicules militaires soviétiques semblaient abandonnés. Nous avions aperçu l'endroit à l'aller et avions décidé de nous y arrêter en revenant.
Nous avons garé le 4x4 sur le bord de la route et nous sommes descendus observer et photographier ces véhicules imposant, notamment un engin à chenilles rappelant un char d'assaut en miniature. 
Au bout de quelques minutes, un type est sorti d'une baraque que nous pensions abandonnée et c'est amené vers nous l'air énervé, semblant râler après nous. Dans un anglais laborieux, il expliqua que ce terrain plein d'épaves était un musée, le sien, et qu'il fallait payer pour pouvoir en faire des photos. 
Arnaque classique pour soutirer de l'argent aux touristes, nombreux, qui devaient s'arrêter sur cette route fréquentée pour faire la même chose que nous. Nous avons d'abord voulu l'envoyer balader, mais comme il était très insistant, nous lui avons réglé ce qu'il demandait pour être tranquilles, l'équivalent de 2€.
Pierrick décida que puisqu'il avait payé, il allait en profiter et y entrer, il demanda au type de lui ouvrir le portail et fit le tour du petit terrain, le mec collé à ses basques et l'air toujours agacé. Pour ma part je n'y suis pas allé car les seuls véhicules intéressants étaient ceux sur le bord de la route. Probablement à dessein, pour inciter les gens à s'arrêter. 

Après cet épisode amusant, nous sommes donc redescendus vers le Sud, revenant sur nos pas. Nous sommes repassé au travers des immenses vallées toujours aussi encombrées de camions, puis dépassé Gudauri pour redescendre jusqu'à Ananouri et son fameux lac. Il nous fallait revenir ici, quasiment aux pieds des montagnes pour pouvoir rejoindre la route, ou plutôt le chemin, qui nous menait dans les vallées du versant opposé.
Notre objectif suivant était un point extrêmement haut dans les montagnes, non loin de l'Eglise de la Trinité à vol d'oiseau, mais il existe une seule route pour y accéder, un chemin de terre interminable à flanc de montagne qui devait nous permettre de rejoindre un village fortifié abandonné, perché sur une montagne: Anatori, situé à quelques centaines de mètres à peine de la frontière russe. 
Nous voulions d'une part visiter les vestiges de ce village, mais surtout ses cryptes, sources de légendes incroyables dans la région, basées sur des faits réels:
" Lorsque la peste noire s'est répandue dans la région, le village d'Anatori a été durement touché et n'a pas pu soigner tous ses malades. Plutôt que d'infecter leur famille et leurs amis, ceux qui sont tombés malades ont pris sur eux de périr dans l'isolement. Ils allèrent, de leur plein gré, mourir dans des caveaux construits à distance. Une fois sur place, les condamnés gisaient sur des étagères de pierre en attendant leur disparition éventuelle, accompagnés uniquement de ceux qui étaient également mourants. Une fois qu'il n'y avait plus de voûtes vacantes, les malades affrontaient leur sort à même le sol, entourés des corps de ceux déjà morts. "
Ainsi, revenus sur les bords du lac Zhinvali, nous avons longé sa rive Sud pour le contourner et remonter sur le coté Est, à nouveau en direction du Nord. Bifurquant presque aussitôt sur un chemin rocailleux qui remontait le long de la vallée sur une cinquantaine de kilomètres vers la Russie.
La route était défoncée, et malgré le 4x4 nous étions sans cesse secoués même en roulant lentement, nous obligeant à faire plusieurs pauses pour souffler un peu. De nombreux obstacles se présentaient devant nous, rochers éboulés, trous profonds, arbres abattus.. qu'il fallait contourner, parfois en manœuvrant pendant plusieurs minutes.
Le paysage quand à lui était au début composé de forêts automnales aux arbres nus et de roches blanches et poussiéreuses.
Nous longions un cours d'eau, une petite rivière appelée Pshavi's Aragvi qui alimentait le lac de Zhinvali en contrebas. Par moment, nous dépassions des villages sur la rive d'en face, ou sur des îlots au milieu de la rivière, reliés à la route par des ponts suspendus rudimentaires constitués de câbles, de cordes et de planches en bois.
Alors que nous nous étions arrêtés près d'un de ces ponts pour manger un morceau, nous avons pu observer deux femmes le traverser de manière assez laborieuse, d'autant plus qu'elles étaient chargées de nombreux paquets et que le plancher rudimentaire du pont tanguait sous leurs pieds. 

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